Content d'avoir vu ces vétérans qui ne font désormais plus aucune concession et jouent la musique qu'ils aiment.
Arrivé vers 20h, petite file d'attente sur le trottoir et l'impression de voir un public bien plus âgé qu'à l'habitude, ambiance chevelu baba la cinquantaine/soixantaine bien tassée.
A 20h15 je me place pile au milieu devant la scène et je m'accroche à mon petit caisson de basse, c'était pas trop difficile vu la salle bien clairsemée à cette heure là. Autour de moi les vestes tombent, que des tee-shirts et des patchs d'Aerosmith, Thin Lizzy, Def Leppard, Led Zep et autres Whitesnake... Un type à moitié bourré n'arrête pas de beugler des Mickey et des Monkey dans un anglais qui ferait pisser de rire une vache espagnole. Il commence à devenir très saoulant au bout de 20mn mais je suis loin de me douter à ce moment là qu'il va nous pourrir tout le concert.
A 20h30 je me dis que le set va commencer, le temps passe, 20h45, puis 21h et toujours rien... Ils se font désirer les bougres, la salle est alors remplie à peine à 1/3, pas glop...
J'écoute les conversations de mes voisins pour passer le temps et ça parle de Hellfest et de concerts de métal, ça sort des CD de hard rock, l'ambiance est donnée, ça me rappelle un peu ma jeunesse. Je scrute la salle par curiosité, pas une coupe afro à l'horizon, on n'est vraiment pas dans un concert de funk.
Un type à côté de moi fait remarquer assez judicieusement que le groupe a le cul entre 2 chaises, trop métal pour les fans de funk et trop funk pour les hardos, du coup ça ne déplace que les plus curieux et le cercle très restreint des fans de la première heure.
Sous mes yeux la set list du concert est scotché au sol et je résiste pour ne pas la lire et me gâcher la surprise. 21h15, mes oreilles s'attardent sur la conversation d'un autre trio où un gars raconte un concert de Mother's Finest de 77 auquel il aurait assisté. 21h30, la salle commence à s'impatienter, elle est désormais remplie au 3/4 mais je doute alors que le concert soit totalement sold out.
Ca commence enfin, pendant 1mn j'ai du mal à identifier le premier morceau, les guitares jouent très en avant et couvrent un peu trop la voix de la chanteuse et puis je comprend qu'il s'agit de "Funk a Wild" tiré de l'album de 2003 "Meta-Funk'n-Physical". Je suis à la meilleure place au pied de la chanteuse et j'ai une vue imprenable sur toute la scène. Dans mon dos l'excité de tout à l'heure gueule et s'agite, je me prend sa main dans la gueule, mes lunettes se barrent mais ce connard ne s'en rend même pas compte. La chanteuse se baisse à 2 cm de nous, je sent son souffle mais l'agité de derrière vient rompre cet instant : en agitant les bras, il lui fout un gros coup dans les gencives. L'espace d'une quinzaine de secondes elle fait une grimace de douleur et le fusille du regard. Le type esquisse un penaud sorry et se calme mais juste l'espace de 2/3 morceaux. La chanteuse échaudée recule d'un mètre son micro et on ne la reverra ensuite pratiquement plus sur le bord de la scène. Par la suite ce groupie vraiment trop expressif tentera d'arracher le médiator des mains du guitariste qui lui criera no I have only one. La vengeance étant un plat qui se mange froid, le chanteur ira finalement lui tapoter le crane avec son micro en le faisant chantonner comme une casserole, comme pour mieux l'afficher, si besoin était...
Pour en revenir à la musique, "Burning Love" et "Truth'll Set You Free" de l'album Another Mother Further s'enchaînent directement, après cette entré en matière quelque peu mouvementée. C'est d'ailleurs cet album de 1977 qui aura largement la part belle ce soir-là avec pas moins de 5 titres incluant les incontournables "Mickey's Monkey" (en medley avec un "Mandela Song" à cappella), "Baby Love" et "Piece Of The Rock".
Le dernier album, Goody 2 Shoes & The Filthy Beast, est représenté avec 3 ou 4 titres incluant "Shut Up", "She Ready" et enfin le titre "My Badd" qui clôturera le show. Ces morceaux jouent l'artillerie lourde mais me paraissent assez fade, peut être à cause de l'effet nouveauté.
Le groupe évitera tous les morceaux d'avant 1976 et pour l'excellent album éponyme de cette année là ne jouera qu'un "Niggizz Can't Sang Rock & Roll" en medley avec "The Wall" du sympathique album Black Radio Won't Play This Record (1992). Toute la période des années 80 est d'autre part soigneusement rangée aux oubliettes et c'est tant mieux. Quant à l'album "Mother Factor", si prisé des fans de funk, il se voit représenter par "Can't Fight The Feeling" et "Don't Wanna Come Back" mais dans des versions très heavy. A l'exception de la toute douce reprise des Beatles "Strawberry Fields Forever", le groupe joue toutes guitares devant et c'est d'ailleurs "Mo" (Garry Moore) le guitariste à la barbiche et au sourire de lutin facétieux qui se voit régulièrement mis en vedette ce soir-là avec son jeu de guitare incisif et fluide.
Wizzard, l'excellent bassiste' me parait très en retrait tout le long du show et c'est un peu une surprise et une grosse déception pour moi, jusqu'à ce qu'il nous gratifie finalement en rappel d'un de ses désormais fameux solo de basse.
Le batteur et le second guitariste qui, s'ils ne sont pas des membres historiques, font depuis très longtemps partie intégrante de l'identité Mother's Finest, assurent sans esbrouffe comme de vieux routiers du rock. Ca riffe à tout va, ça frappe sec sur les futs, on en prend plein la tronche.
Glenn Murdock avec ses petits déhanchés funky assure clairement de son côté la facette la plus soulful du combo au milieu d'un mur de guitares vrombissantes. A presque 70 balais, Joyce Kennedy, impériale maitresse de cérémonie, joue le registre de la puissance avec une voix des plus pêchue et on imagine bien ce qu'elle doit envoyer pour pouvoir se faire entendre au milieu d'un tel déluge électrique. La diva clamera à tout va ce soir là à son public conquis d'avance son amour des guitares, comme pour mieux faire comprendre aux esprits chagrins que Mother's Finest est un putain de groupe de rock sans esbrouffe, frime, ni fioriture.
Mon placement stratégique aidant, je l'ai joué shake hands avec tous les membres de mon groupe fétiche, c'était vraiment du grand luxe de les voir au plus près dans ces conditions-là. Il n'en reste pas moins que je regrette de n'avoir connu qu'en vidéo la période live seventies du combo à mon goût nettement supérieure à ce vers quoi s'est tourné MF aujourd'hui. Quel bonheur malgré tout en 2015 de pouvoir voir au plus près les 4 mythiques membres d'origine de ce que fut le grand Mother's Finest des années 70.