Moi je ne suis pas tout à fait d'accord. Exposé comme l'a fait foxy, tout paraît clair comme de l'eau de roche, mais j'ai appris à me méfier des fausses évidences.
De toutes façons je pense que sur ce type de sujet tant qu'on a pas d'étude sérieuse avec des chiffres de vente précis, on peut raconter n'importe quoi (et même les chiffres en soi il faut les interpréter).
Le problème dans ton raisonnement c'est qu'il sous-entend qu'il y a une équivalence entre le nombre de téléchargements d'un film ou d'une œuvre en général et le nombre de vente perdues. C'est une hypothèse qui me paraît très discutable.
Je pense au contraire que c'est la disponibilité en téléchargement qui va conduire certains (beaucoup) à downloader et visionner (ou écouter) une œuvre, dont ils se désintéresseraient par ailleurs radicalement, et que de toutes façons il n’achèteraient pas, quand bien même la possibilité de télécharger serait éradiquée.
Pour le dire plus simplement ce n'est pas parce que 1000 personnes téléchargent un film que les même 1000 personnes l’achèteraient s'il n'y avait pas d'autre moyen d'en profiter. Or il est pratiquement impossible d'établir la moindre proportion entre les deux chiffres si on n'a pas d'étude précise.
Ce n'est pas le fait qu'un film comme Fox Style soit dispo sur un blog comme BP qui empêche sa réédition en version restaurée. Mais le simple fait qu'une telle entreprise n'est pas rentable, et ne peut pas l'être. Moi je pense qu'il y a peut-être 500 personnes sur la planète que ça intéresse, allez soyons fous 1000 ou 2000. En récupérant 10 euros (ce qui semble beaucoup compte tenu des marges de distribution) par dvd ça fait 20000 euros de CA en étant optimiste, donc ce type de projet ne peut se faire qu'à perte ou être de l'ordre du bénévolat. Et si le téléchargement n'existait pas ça ne changerait absolument rien.
Des blax rentables il doit y en avoir 20 à tout casser et pour la plupart ils sont réédités depuis des années, et probablement bien amortis (je ne pense pas par exemple que MGM ait perdu de l'argent avec la collection Soul Cinema, surtout si on ajoute les recettes en PPW, mais là encore il faudrait connaitre les chiffres).
Donc le problème est d'abord lié pour moi à l'étroitesse du marché potentiel, c'est une tout petite niche.
Ensuite il y a le problème de la promo et de la distribution. Combien de pourcentage des ventes, pour un film lambda, se font en grandes surfaces, là où tu n'as aucune chance ou presque de trouver les articles des petits éditeurs obscurs?
Comment ensuite espérer écouler 10 000 dvd d'un film obscur qui n'intéresse de fait que 500 personnes sans une promo béton? Comment faire pour avoir un article dans Télérama, les Inrocks, Libé ou Le Monde, qui permettrait de faire connaître le projet et de booster les ventes? Tu sais bien qu'à ce niveau là les dès sont pipés dès le départ.
Comment, ensuite, faire en sorte quand le truc est distribué qu'il soit bien présenté, pourquoi pas en tête de gondole, plutôt que perdu dans un rayonnage. Ou mis en valeur sur un site ou dans un catalogue si on passe par la vpc? Là aussi chez certaines enseignes le jeu est faussé et tu le sais bien.
Je trouve ça un peu manichéen de criminaliser de manière générale l'internaute lambda sans poser la question de la mainmise de quelques groupes sur le marché des biens culturels.
FoxyBronx a écrit :
Pour tous les petits films que tu viens de citer, ça n'est certainement pas ce genre de sites de download qui va favoriser leur ressortie dans de belles copies un jour : mettre des billes sur le tapis pour restaurer un Fox Style ou un Speeding Up Time que tu cites, il faudrait être sacrément maso'.
Ca c'est un discours qui frôle l'élitisme... il faudrait donc organiser la pénurie pour favoriser la probabilité d'une hypothétique réédition restaurée? Tandis bien sûr que quelques initiés (sur quels critères?) pourraient s'échanger des fichiers sur cinemageddon ou autres?
Moi je n'ai pas envie d'attendre 10 ans une hypothétique restauration d'un film pour avoir une chance de le voir. D'ici là j'aurai peut-être passé l'arme à gauche.
A contrario on peut aussi penser que c'est grâce à internet, grâce à ce type de blogs qui rendent dispo des films oscurs en rip de VHS épuisés que des œuvres obscures vont gagner une nouvelle réputation, et que la niche potentielle pour une eventuelle réédition pourra s'accroitre.
C'est en tout cas ce qui se passe avec la musique, où des tas d'albums n'ont été réédités que parce qu'ils ont gagné une nouvelle réputation sur le net.
FoxyBronx a écrit :
Au passage La Caverne Des Introuvables à qui tu rends hommage n'était pas la dernière à ripper des DVD, une grosse partie de son contenu n'avait rien d'introuvable : évidemment là c'était mis à disposition gratuite alors forcément quel succès...
Oui sur certains titres ils ont fait la même erreur que BP, mais c'était vraiment minoritaire. Sur la caverne tu trouvais des authentiques introuvables, des trucs qu’il est de toute façon suicidaire de rééditer en dvd ou en blu-ray, et la majeure partie des trucs déjà réédités n’étaient pas disponible en vf ou vost. Donc les gars faisaient des post-synchro à partir de leurs casettes vhs, parfois en nettoyant le son. Pour quelques films, certains ce sont pris la tête à faire des sous-titres. Il faut être motivé et je ne doute pas une seconde de la sincérité de leur démarche.
Toi comme moi, et on est nombreux ici, de toutes façons, si un truc nous plaît vraiment, on finira par se le procurer s'il est disponible, qui en disque vinyle d'époque ou en réed, qui en CD, qui en DVD. Je pense que c'est comme ça pour tous les passionnés. Les films dont tu parles s'adressent avant tout à des passionnés (si tu ne l'es pas tu ne vas pas au bout de Speeding Up Time

).
Il paraît qu'il y a des études qui montrent que ceux qui téléchargent le plus sont aussi ceux qui dépensent le plus en biens culturels. Comme je ne les ai pas lues, je ne serai pas totalement affirmatif sur ce point, mais ça fait réfléchir.
Pour le reste, je ne vais sûrement pas pleurer sur les déboires des majors de l'industrie du spectacle, qui se complaisent depuis des années dans la médiocrité et le moins disant culturel, et cherchent justifier leur médiocrité en criminalisant l'internaute lambda.
En revanche le problème des copié-collés de blogs sur internet, c'est une autre paire de manche, mais là on mélange un peu tout...