The Continental IV - Dream World

Funk, Soul, Deep Funk, Deep Soul, Soul Funk…

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Revpop

The Continental IV - Dream World

Message par Revpop »

LA SOUL OU LA PASSION SELON SAINT FREDDIE

The Continental IV - Dream World (Jay-Walking IWL-1020, 1972)

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Titres

A1 (You're Living In a) Dream World (Norman Harris - Allan Felder) - 2:58
A2 Nite Moods (Robert L. Martin) - 4:58
A3 I Don't Have You (Saundra McGregor) - 2:47
A4 Escape From Planet Earth (Robert L. Martin) - 4:13
A5 Take a Little Time To Know Me (Robert L. Martin) -3:18

B1 Day By Day (Every Minute of the Hour) (Robert L. Martin - Eugene Lemon) -2:58
B2 Heaven Must Have Sent You (Eddie Holland - Lamont Dozier - Brian Holland) - 2:55
B3 How Can I Pretend (Thomas Keith) - 2:57
B4 The Love You Gave To Me (Robert L. Martin) -2:43
B5 Running Away (From Love) (Norman Harris - Allan Felder) - 2:50

Crédits

The Continental IV

Freddie Kelly : chant principal
Ronnie McGregor : chant principal et premier ténor
Larry McGregor : chant principal et second ténor
Anthony Burke : chant principal et bariton

Ronnie Baker : basse
Norman Harris : guitare
Roland Chambers : guitare
Bobby Eli : guitare
Earl Young : batterie
Larry Washington : congas
Vince Montana : percussions
Lenny Pakula : piano, orgue
Sam Reed : saxophone
John Davis : saxophone
Zach Zachery : saxophone
Fred Joiner : trombone
Richard Genevese : trombone
Bob Moore : trombone
Rocco Bene : trompette
John Lynch : trompette
Bobby Hartzel : trompette
Fredric Cohen : hautbois

Don Renaldo : cordes
Tony Sinagoga : cordes
Christine Reeves : cordes
Richard Jones : cordes
Rudy Malizia : cordes
Angelo Pretrella : cordes
Albert Berone : crordes
Romeo DiStefano : cordes
Charles Apollonia : cordes
Davis Barnett : cordes
Herschel Wide : cordes

Arrangements : Bobby Martin
Production : Bobby Martin


La pochette rutilante, tondo Botticellien mixant sexe et carrosserie, est un leurre : il se cache ici une Passion minée par le Tragique.
Passion portée par l'un des plus beaux falsettos qu'ait connus la Soul : Mr Freddie Kelly, lead vocal du groupe Continental IV composé d'Anthony Burke (baryton) et des frères McGregor (ténors).
Groupe éphémère d'un seul LP, Dream World, sorti en 1972 et qui est considéré par Dusty Groove comme One of the great lost classics of East Coast harmony soul of the 70s"

Cela débute en 1970 comme un véritable conte de fée : Bobby Martin, qui commence à posséder une sacrée réputation d'instrumentiste et d'arrangeur chez Gamble et Huff, rencontre des lycéens bourrés de talents, décide de les prendre sous son aile et de les produire sous le nom de Continental IV. Le pitch du drame qui se trame est que Bobby n'est pas le seul à fondre aux voix magiques de cette jeunesse aux choeurs d'anges, c'est ainsi que Gamble et Huff sont aussi très intéressés et veulent les avoir absolument dans leur écurie et de façon exclusive. Il s'ensuit une grosse bataille. Quolibets et partitions fusent, où finalement Bobby obtient gain de cause mais au prix de la fuite et de l'exil.
Effectivement, pour s'échapper du champ de vision et de l'ire des roitelets de la Philly, Bobby et les 4 membres de Continental IV s'enfuirent en prenant, précipitamment - sans idée de retour -, le train "Philadelphia to Harrisburg Main Line" et ils ne traversèrent nul océan, nulle montagne mais le pire obstacle qui puisse exister : le pays des Amishs dont tout le monde sait que leur croyance leur interdit toute sorte de musique...
Nous pouvions supposer que le conte de fée continuât dans le sens où ils atterrirent, par la suite, à Harrisburg et furent engagés séance tenante par le révérend Robert Fulton sur son label au nom prédestiné et magique de Soulville (même si, in fine, ils enregistrèrent pour le label soeur Jay Walking - réservé aux groupes dont il était difficile de prédire le futur...).
Et pourtant, ce futur, Bobby l'imaginait grand et renversant : il s'agirait de produire une Symphonie Soul pour voix séraphique qui plairait tout d'abord au révérend, qui évangéliserait dans un second temps les Amish et pour terminer qui battrait à plate couture les (pauvres) productions de Gamble et Huff. Il fit tout pour s'en convaincre : en plus des arrangements, il composa la moitié des morceaux, convoqua la crème des musiciens Philly et enregistra au temple des studios, soit le fameux Sigma Sound Studios.
Pendant ce temps-là, une autre destinée se dessinait : Gamble et Huff, revanchards, tombèrent amoureux du falsetto de Russell Thompkins Jr.'s des Stylistics comme leur futur producteur Thom Bell et ceci donna une des plus belles success story de la Philly Sound que l'on connaît, avec en prime un vrai Happy End.
Tout ce que ne fut pas le rêve ébréché de Bobby, son Fitzcarraldo à lui. Personne ne comprit pourquoi la carrière des Continental IV fut si brève. Nous savons juste que la voix de Freddie Kelly s'est éteinte mais nous ne savons ni quand ni comment, comme si cette voix s'était volatilisée dans un dernier moment de grâce par un beau soir de 1972.

Maintenant, imaginez un nightclub qui aurait comme mascotte une Lincoln Continental Golden Sunset flambant neuve trônant au milieu du décor composé de multiples tables basses sur lesquelles se reposeraient des lampes damasquinées et des cadavres de Budweiser.
Cette nuit, c'était au tour de Continental IV de faire le show.
Dès les premiers instants, la magie opéra : Freddie K. au devant de la scène, la lumière nimbant sa silhouette, celle-ci, penchée - aspirée - vers ses admirateurs, semblait être irréelle, seule sa voix - son falsetto légendaire - nous frappa physiquement, incendiant notre lobe temporal en étincelles phosphorescentes sur les premiers accords de sitar de "(You're Living In A) Dream World". La sitar aux couleurs orientales, les hautbois mozartiens au parfum classique s'engouffraient par delà cette voix de cristal, la portant au pinacle.
Hébétée, la salle pétrifiée se réchauffa au son du jazzy "Nite moods" où les harmonies divines se combinaient à un refrain de comédie musicale des années cinquante pour laisser place à un long solo de saxo à la note bleue qui donnait l'impression que l'espace s'agrandissait autour de vous dévoilant des balconnets suspendus, des terrasses avec vue sur la mer ornées de palmiers plantureux.
Cette image disparut, la passion reprit sa place avec "I don't have you". Que d'échanges amoureux, que de combats amoureux transmis littéralement par cette symphonie juvénile entre le falsetto solo de Freddie K.(identification fusionnelle avec la jeune autrice de 16 ans Saundra McGregor) et les choeurs interprétés par ses frères McGregor. Une intensité, une explosion de sentiments à la lisière de certains interdits ...
S'en suivit "Escape from planet Earth" : un thème de science fiction, bruitage avant-gardiste, chambre d'échos, une rythmique divine et funky cisaillée par des guitares tranchantes et des cuivres sortis des enfers où l'on reconnait la patte de Bobby ainsi que la richesse de sa palette : tout cela désorienta, renversa définitivement un public déjà tout abasourdi.
Heureusement arriva une offrande pour celui-ci sous la forme d' une ballade onctueuse "Take a little time to know me", un trésor de Sweet Soul, un baume guérissant les âmes.
La tension augmenta de nouveau d'un cran avec "Day by day (Every minute of the hour) où ici l'Harmony Soul par le jeu, voire l'affrontement, entre le falsetto et les choeurs, devient le théâtre d'une tragédie grecque et non plus un enjeu pour de simples harmonies si belles soient elles. Une nouvelle fois, Freddie K. lança ses poisons à la face de spectateurs à la limite de l'overdose, puis sortit de la scène laissant le reste du groupe décliner un "Heaven must have sent you" archi-connu, relax et légèrement up tempo.
Il revint, toujours aussi fantomatique, pour administrer à son public une dernière ligne droite où l'issue sera fatale.
Cela commença comme un concerto de hautbois, des harmonies en sucre d'orge entrèrent en scène et "How can I pretend" s'enfla pour devenir une autre tragédie soul dans laquelle Freddie K. en serait le héros. Le morceau funky qui suit "The love you gave to me" servit d'entracte, les fans à l'abandon - sourire aux lèvres - , pour mieux les achever sur "Running away (from love)", vaste tragédie d'Harmony Soul avec son ouverture hollywoodienne et dans laquelle le falsetto de Freddie K. atteignit des sommets de désespérance, et ce filet de voix si fragile, cette colonne d'air divin, se changea en une tornade inarrêtable.

L'image disparaît ; les lumières blafardes ré-apparaissent .
Les frères McGregor et Anthony Burke, hagards, livides et extatiques, sont toujours là sur la scène. Par contre, au devant de celle-ci, il ne reste qu'un micro Shure encore ruisselant, Freddie K n'est plus.
Certains disent que les soirs de pleine lune aux ivresses automnales, des échos de voix se font entendre parmi les bocages, psalmodiant invariablement "Dream world" au fin fond du pays des Amish...

Note : 5.5 stars / 6


(You're Living In a) Dream World :


Nite Moods :


I Don't Have You :


Escape From Planet Earth :


Take a Little Time To Know Me :


Day By Day (Every Minute of the Hour) :


Heaven Must Have Sent You :


How Can I Pretend :


The Love You Gave To Me :


Running Away :


Extra Bonus : The Way I Love You :
Modifié en dernier par Revpop le 13 juin 2018 22:37, modifié 6 fois.


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Wonder B

The Continental IV - Dream World

Message par Wonder B »

Un magnifique album malheureusement quasiment introuvable en pressage original, mais qui pour le bonheur des amateurs a été réédité.
Enfin même si je suis sensible aux envolées lyriques de ton superbe post, il n'en reste pas moins que même ayant fui Gamble & Huff, le personnel qui les accompagne est la base même du Philly Sound et quasiment l'intégralité des musiciens qui enregistrèrent sur PIR pendant les grandes années du label sous la houlette des deux génies de Philly.
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funkiness
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The Continental IV - Dream World

Message par funkiness »

Encore une notule magistrale pour un disque qui ne l'est pas moins, double régal, bravo Revpop ! la voix de Freddie Kelly est ahurissante, et ce LP d'un lyrisme à couper le souffle... :drunk:
Wonder B a écrit :il n'en reste pas moins que même ayant fui Gamble & Huff, le personnel qui les accompagne est la base même du Philly Sound et quasiment l'intégralité des musiciens qui enregistrèrent sur PIR pendant les grandes années du label sous la houlette des deux génies de Philly.
Je crois que Revpop a bien écrit que les musiciens de Philly ont été "convoqués" pour l'enregistrement ;)
funkiness brings you funk and happiness
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in the jungle groove

The Continental IV - Dream World

Message par in the jungle groove »

merci à toi Revpop pour ce superbe post qui secoue bien le cocotier! ;) Tu recentres parfaitement les débats! :cool:

Je ne connaissais pas cet album et pour la peine, je vais me mettre en chasse! :cool:
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Wonder B

The Continental IV - Dream World

Message par Wonder B »

funkiness a écrit :je crois que Revpop a bien écrit que les musiciens de philly ont été "convoqués" pour l'enregistrement ;)
Commet faire pour convoquer les musiciens qui sont à la solde de Gamble & Huff si ceux ci n'avaient pas été d'accord...
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funkiness
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Message par funkiness »

C'est quand même Bobby Martin, et je suppose que les musiciens avaient toute latitude pour jouer où et avec qui ils voulaient
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Wonder B

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Message par Wonder B »

Là je ne suis vraiment pas sûr que ça se passait comme ça. Je vais poser la question à Bobby Eli.
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funkiness
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The Continental IV - Dream World

Message par funkiness »

Tu vois bien qu'ils sont presque tous là, sauf Gamble & Huff.
funkiness brings you funk and happiness
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Wonder B

The Continental IV - Dream World

Message par Wonder B »

C'est bien ce que je dis Funkiness. Si c'était vraiment la guerre entre Bobby et G&H comment les zicos de G&H auraient-ils eu le ticket de sortie! Ceux qui leur donnait les pépètes pour faire bouillir la marmite c'était G&H quand même. Donc je pense qu'ils n'étaient pas trop en bisbille, c'est tout ce que je veux dire.
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Phil

The Continental IV - Dream World

Message par Phil »

funkiness a écrit :c'est quand même Bobby Martin, et je suppose que les musiciens avaient toute latitude pour jouer où et avec qui ils voulaisent
Bien sûr : Once signed as part of MFSB, the musicians could continue to play on sessions for whomever else they wanted. But anything they recorded for Gamble and Huff would now credited to "MFSB". (A House On Fire, pg 115)

Image

http://books.google.com/books/about/A_h ... 9dzY9PvfIC

Un livre très instructif. :cool:
It's what's in the grooves that count
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Revpop

The Continental IV - Dream World

Message par Revpop »

Merci mes chers funk-o-logues pour vos encouragements et surtout vos précisions précieuses.
En écrivant cette histoire, je me suis fait la même réflexion que Wonder B : faire un bras d'honneur à G&H et enregistrer par la suite au Sigma avec tous les musicos du MSFB, c'est (éventuellement) remettre en cause le principe de causalité ou vulgairement parlant ça fait "n'écoutez pas l'histoire c'est du bidon" !
Or les deux faits sont vrais : la dispute avec G&H a été rapportée par la petite soeur MacGregor (celle qui écrit le joyau "I Don't Have You" à l'âge de 16 ans) et la liste des musicos sur la pochette. Je ne pouvais pas faire autrement que d'associer les 2, surtout que le premier m'offrait un ressort dramatique que tout chroniqueur aurait rêvé d'avoir ou aimé inventer.

Toutefois pour moi le plus important c'est le Mystère Freddie K. Il a complètement disparu de la circulation, j'ai passé des jours à écrémer la Toile pour savoir uniquement qu'il était "passed away" : c'est tout ! Alors que les autres membres de Continental IV écument encore aujourd'hui le circuit américain des clubs (ils ont un myspace :D )
J'espère qu'avec vous, je convoque ici-même les plus fins limiers de la funk-o-logy :afro: , j'en saurai plus sur l'histoire de Freddie K, sa vie, son oeuvre...

Une autre petite anecdote, sur le site de Bobby M., dans la section "Product for Sales", au milieu de quelques CD à vendre il y a une ré-édition du LP de Continental IV (avec 2 faces B en plus) sous le sobriquet "Explosion" : ça a dû barder sec avec G&H... :pale:
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Phil

The Continental IV - Dream World

Message par Phil »

Wonder B a écrit :Un magnifique album malheureusement quasiment introuvable en pressage original, mais qui pour le bonheur des amateurs a été réédité.
Il n'est pas si rare Wonder :http://collectorsfrenzy.com/Default.asp ... &x=33&y=12
Ou alors il n'est pas si recherché...

Revpop, si les autres membres ont un myspace, tu pourrais peut-être les contacter pour savoir comment est mort Freddie Kelly ? :cool:
It's what's in the grooves that count
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funkiness
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The Continental IV - Dream World

Message par funkiness »

ah oui, autour de 50$, c'est jouable ;)
funkiness brings you funk and happiness
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Jean

The Continental IV - Dream World

Message par Jean »

c'est vrai que l'original n'est pas hors de prix, mais on le voit rarement passer (dans la "vraie vie"). J'attends toujours la bonne occase, il faut être patient :P
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Wonder B

The Continental IV - Dream World

Message par Wonder B »

Tu as raison Jean, c'est un disque que je n'ai jamais vu dans un magasin aux US...
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